VESPA : bulletin N° 5 - Fossiles
L’objectif principal d’une drague est de déterminer la composition des fonds marins, leur âge, et leurs conditions de mise en place. La paléontologie est un outil très efficace pour cela.
Depuis le début de la campagne VESPA, nous avons réalisé six dragues, dont, par chance, cinq ont déjà pu délivrer des contenus micropaléontologiques exploitables scientifiquement. Les microfossiles en questions sont, pour l’essentiel, les fines enveloppes carbonatées d’organismes planctoniques unicellulaires : les foraminifères. Au cours de leur vie, ces créatures se laissent porter par les courants marins autour du globe et à leur mort, leurs squelettes tombent et s’accumulent pour former une sorte de soupe boueuse à la surface des fonds marins. Avec le temps, cette boue se compacte, évacue ses eaux interstitielles et devient peu à peu une roche calcaire solide. Notre première récolte de foraminifères a été réalisée lors du second essai d’échantillonnage grâce à un petit tube de métal attaché à l’extrémité de notre drague.
Dans beaucoup de cas, les variétés de foraminifères peuvent être identifiées par simple observation à l’aide d’une loupe binoculaire. Les échantillons sont extraits de leurs gangues, rincés, nettoyés, séchés et montés sur des supports d’observation. Leur reconnaissance permet de déterminer l’âge de ces organismes ainsi que leurs conditions de vie. La micropaléontologie étant une discipline ancienne de plus de 200 ans, nous profitons aujourd’hui d’un catalogue très complet concernant l’évolution des morphologies au cours du temps. Un spécialiste entraîné peut donc en principe identifier une période de temps géologique avec une résolution de l’ordre de 1 à 3 millions d’années… Nous regrettons donc de ne pas profiter de telles compétences à bord.
Des cocolithophoridés (carbonatés), des radiolaires et de diatomées (squelettes siliceux), viennent également compléter le cortège de microfossiles de la drague 3. Il n’est toutefois pas possible de les identifier de façon définitive en l’absence d’un véritable microscope à bord du bateau.
Lors de notre sixième essai de drague, nous avons remonté à bord un calcaire coquillé constitué de fossiles, non pas micro, mais macroscopiques. Il s’agit d’un assemblage de fragments de coraux, de coquilles de mollusques, d’articles d’oursins, et de précipitations dues à des algues. Ce type de contenu est caractéristique d’un environnement proximal peu profond, ce qui pose problème puisque cette drague a été remontée de profondeurs aujourd’hui supérieures à 770 mètres. Une explication à cela serait que les fonds marins dans ce secteur se soient brutalement approfondis de plus de 750 mètres… Une autre, que cette roche ait été tout simplement arrachée et redéposée à cet endroit par un courant sous-marin. La première hypothèse pose trois principales questions: quel serait l’âge de formation de la roche, quand aurait eu lieu l’approfondissement et enfin : quelle en serait la cause ? Répondre à ce type de questions est typique de la démarche en géologie dont l’objectif est toujours de résoudre certains problèmes concernant l’histoire de la Terre, et dans le cas bien précis de la drague 6, l’histoire de la ride de Norfolk.
L’ensemble des échantillons récoltés pendant la campagne VESPA, sera conservé, décrit, catalogué au centre GNS de Lower Hutt (Nouvelle Zélande) ainsi qu’au service géologique de Nouvelle Calédonie à Nouméa.
Malheureusement jusqu’à présent : aucun trésor, aucune épave de bateau n’ont encore été remontés par une drague au cours de cette mission…
Ecrit par Hamish Campbell et Nick Mortimer. Traduit par Arnaud Agranier.
Fossils
The main purpose of dredging the sea floor is to establish what rocks there are, what their age is and what environment they formed in. Fossils are an easy and informative way to get this information.
So far we have made six dredges on the VESPA voyage and have been fortunate to find microfossils in five of them. Microfossils are the calcium carbonate shells (tests) of marine plankton, mainly abundant foraminiferans (‘forams’). These are tiny, single celled-animals that float in vast numbers around the world’s oceans. When they die their tests fall to the ocean floor and accumulate as a soupy mud called ‘ooze’. Eventually foram ooze hardens and becomes limestone. Our first foram ooze was dredged in VESPA dredge 2, being caught in a small metal tube, sealed at one end, which is attached to the main dredge.
Foram species are identified by looking at them under a common laboratory binocular microscope. First, the forams are washed or scraped out of the ooze or rock. They are then sieved, dried and placed on cardboard mounts to identify under a microscope. Their identity will determine their age. The science of micropalaeontology is more than 200 years old, so there is a well-established record of how the species evolved with geological time. A trained micropalaeontologist can easily determine the age of the rock to within a range of 1-3 million years (if only there was one on board!).
Apart from forams, other single-celled microfossils that might be found on the VESPA campaign are radiolarians and diatoms (which have silica, rather than carbonate tests) and ornate platy coccoliths (much smaller than forams, best known as the main ingredient of chalk). Limestone recovered in dredge 3 may well contain radiolarians and nannofossils. Definitive identification of radiolarians, coccoliths and diatoms is not possible on the VESPA campaign because they require a more powerful microscope than we have on board.
VESPA dredge 6 included a shelly limestone comprised of fossils that were not microscopic but were visible and obvious – macrofossils. The fossils identified were rounded and lumpy broken coral, clams, snails, sea urchin spines and coralline algae. These kinds of fossil indicate a very shallow near-shore environment. However, the dredge came from water that is now deeper than 770 metres. Very interesting! One explanation is that the seafloor has been dropped at this site by more than 750 metres (relative to today’s sea level). Three questions immediately spring to mind: when exactly did this limestone form i.e. how old is it? When did the seafloor sink? And why? Answering such questions is what geology is all about: solving questions about the Earth’s history. In our particular case it is about solving questions about the Norfolk Ridge (south of New Caledonia).
All fossil samples collected on the VESPA voyage will be curated and catalogued at GNS Science in Lower Hutt, New Zealand, and at the Geological Survey of New Caledonia, Nouméa.
No ships, gold coins, bones or boots have yet been found on this mission.
Written by Hamish Campbell & Nick Mortimer. Translated by Arnaud Agranier.